Malgré plusieurs mois de controverse, le Parlement Européen a statué, en Mars 2019, en faveur de ce que l’on appelle communément l’Article 13. Les créateurs sur Youtube, Twitch, Instagram en font la critique permanente depuis près d’un an. Un frein à la créativité, une censure excessive, la fin de Youtube… autant de superlatifs qui ont été utilisés pour qualifier la « Directive Européenne sur les droits d’auteurs ».
L’article 13, c’est quoi ?
Avant de pouvoir évoquer l’impact sur nos métiers, il est essentiel d’avoir des éléments de compréhension sur l’article 13.
Globalement, celui-ci vise à protéger les ayants-droits (personnes ayant des droits d’auteurs sur une oeuvre) d’un média, un producteur de musique, un chanteur, un réalisateur, un artiste, créateurs de contenu, etc.
Là où les vidéastes sont concernés, c’est que les obligations de la directive impliquent notamment le partage de contenus sur Youtube. La plateforme de streaming sera désormais responsable des contenus qui y sont publiés et donc du respect des droits d’auteurs dans ceux-ci. Youtube ne sera plus considéré comme un simple hébergeur de contenu (se devant de supprimer les violations de droits d’auteur si elles lui sont signalées), mais comme un média à part entière. Ainsi, la plateforme aura désormais une responsabilité « pleine et illimitée » comme évoqué par Eloise Wagner, juriste et vidéaste. Youtube devra ainsi s’assurer, et ce avant tout signalement extérieur, que les droits d’auteurs soient respectés.
Cela peut impliquer deux solutions :
- La mise en place d’accords de licence avec les ayants droits. Avec un versement d’argent aux ayants-droits en échange du droit d’utilisation de leur oeuvre sur la plateforme. Mais c’est une solution coûteuse et extrêmement complexe à mettre en place. Imaginez l’usine à gaz, devoir trouver un accord avec TOUS les producteurs, les médias, les auteurs indépendants, ça relève de l’impossible…
- La mise en place d’un filtre automatique des contenus. Grâce à un algorithme qui examine chaque contenu avant publication. Mais c’est quasi-assuré d’avoir une forme de censure, même involontaire.
Cette deuxième option est évidemment la plus envisageable. Le filtre déjà actif, Content ID pourrait donc connaitre un durcissement significatif.
Quel avenir pour les hébergeurs de contenus ?
Comme on peut le deviner, la plateforme vidéo de Google a tout intérêt à ce que ce texte soit revu et allégé. En effet, plus de pouvoir aux ayants-droits, c’est plus d’argent à verser pour Youtube. C’est dans cette optique qu’ils jouent sur la peur de leurs vidéastes, et leurs utilisateurs, et les encouragent à se mobiliser pour un adoucissement de la réforme. (En occultant probablement que les vidéastes sont, eux aussi, des ayants droits).
C’est le futur des plateformes plus petites que Youtube qui interroge également. Viméo, Dailymotion, SoundCloud n’ont pas les moyens financiers de Google et Youtube, vont-ils pouvoir survivre à cette mesure ?
En tout cas, tout semble indiqué pour que le monopole de Youtube se pérennise toujours plus.
L’impact sur nos métiers
Dans l’apparence, pour les community managers et content managers, créateurs de contenu de marque, la mesure n’a que peu d’importance. Ils seront simplement plus réglementés sur la musique utilisée pour leurs créations.
Dans les faits, c’est un peu plus complexe, les professionnels de la communication digitale et experts du brand content le savent bien, Internet et ses codes bougent vite. Les CM utilisent régulièrement des références à des memes, des extraits d’émissions, des jingles, des musiques de film, etc. Et les community managers vont désormais pouvoir se plaindre de règles strictes sur Youtube au même titre qu’ils sont nombreux à le faire sur Facebook…
Pour résumer, Youtube et son algorithme Content ID ne seront exploitables pour les professionnels du marketing digital qu’en créant un véritable contenu original. Si vous êtes annonceur, nous vous conseillons donc vivement de faire appel à des professionnels du web et de la création vidéo pour éviter de voir vos contenus supprimés par Youtube à cause de l’article 13.